ETUDE DES FORCES INTERMOLECULAIRES AU SEIN D'UNE PAIRE DE MOLECULES RELATIVES A DES INTERACTIONS FAIBLES (TYPE VAN DER WAALS) OU MOYENNES ET FORTES (LIASON HYDROGENE).
Les nombreux travaux entrepris dans ce domaine ont concerné, d'une part, l'étude d'interactions faibles liées aux propriétés structurales de complexes de stoechiométrie variable et à la solvatation progressive d' un soluté, et d'autre part l'étude d'interactions fortes relatives à la dynamique de la liaison hydrogène, à la réactivité et à l'influence de l'environnement sur le transfert du proton dans une paire de molécules. Les principales recherches, présentées ci-dessous, ont été entreprises en utilisant la technique des matrices de gaz inertes couplée la spectroscospie infra-rouge. Rappelons que cette technique consiste à projeter lentement sur une face refroidie au voisinage de la température de l'hélium liquide un mélange gazeux constitué d'un gaz inerte M (gaz rare, azote, oxygène, méthane, ... ) et d'une ou plusieurs espèces spectroscopiquement actives R, ces dernières en faible proportion. En faisant varier le rapport des concentrations M/R ou en élevant de quelques degrés K la température pour permettre la diffusion des seules espèces R, on peut observer des agrégats bi ou multimoléculaires. Du fait de l'existence de faibles forces intermoléculaires entre la matrice et le dopant conduisant à des temps de relaxation vibrationnelle longs, cette technique présente des avantages tels que: affinement des signaux, faible déplacement des niveaux vibrationnels par rapport au gaz.
1) Etude des interactions spécifiques de van der Waals entre le perfluorotertibutanol (PFTB) et différents dopants moléculaires [14, 25]
En matrice d'argon, le PFTB existe sous deux conformères de stabilité voisine. Sa solvatation progressive en fonction de la fraction molaire du dopant ajouté à l'argon a pu être suivie par la disparition d'un des conformères.
2) Caractérisation des complexes formés entre le PFTB et différentes bases ( acétonitrile, acétone, nitrométhane) en solution et en matrices. [17, 40, 45, 46]
3) Polymérisation de l'iodure d'hydrogène en matrice d'azote. [30]
Deux formes différentes pour le dimère et le trimère dont l'équilibre dépend de la température ont été caractérisées. L'ensemble des résultats a mis en évidence l'influence des interactions anisotropes dopant
dopant et matrice-dopant sur la stabilisation des agrégats.
4) Etude comparée des interactions eau-acétonitrile, eau-diméthyl éther. [23,24]
Cette étude avait pour objet la comparaison de la solvatation de l'eau par les deux bases qui peuvent jouer le rôle de solvant dans de nombreuses réactions de chimie organique. Les perturbations de la molécule d'eau apparaissent plus fortes avec le diméthyléther bien que l'affinité protonique des deux bases soit très voisine. La double solvatation de l'eau diffère selon les bases. Avec le diméthyléther, les deux molécules de base attaquent les deux liaisons OH (B ... HOH. .. B) alors qu'avec I'acétonitrile, c'est le dimère d'acétonitrile (centrosymétrique) qui attaque une des liaisons OH et la double solvatation de l'eau n'est observée qu'à partir du complexe 1/3.
Les tenseurs polaires de l'eau complexée sont fortement transformés. Dans le cas du complexe 1-2 avec le diméthyléther où l'eau garde sa symétrie C2v, il a été possible de développer un calcul de ces' tenseurs dans les hypothèses de la conservation des signes des coefficients du tenseur et de l'intensité de la bande obtenus avec le monomère.
5) Identification d'agrégats (XH)m (CH3CN)n en matrices d'argon et d'azote (X= CI, Br. I). [26]
Le but de cette étude était de justifier le comportement très différent des hydracides vis à vis de l'acétonitrile observé dans la phase gazeuse: formation de complexes 1-1 stables avec HF et HCI, formation de composés solides du type CH3 CHXNH" X avec HBr et IH.
En matrice d'argon, on observe des complexes faibles avec tous les hydracides, l'interaction entre l'atome d'azote et l'hydrogène étant principalement de nature électrostatique donc plus faible pour HI que pour HCl. En matrice d'azote, des résultats très différents sont observés en passant de HCI à HI. HBr donne lieu à la formation de deux complexes 1-1 résultant de deux différentes possibilité d'attaque du groupement -C,N, l'une axiale, l'autre perpendiculaire. Cette observation est confirmée par les propriétés spectrales des
complexes 2-1 où pour HCI on observe un enchaînement linéaire du type CI-H. .. CI-H. .. NC-CH3 alors que pour HBr c'est un complexe du type CHr CN ... HBr qui est formé.
Le comportement de HI apparaît très particulier. Le complexe faible formé se photodissocie dans le rayonnement infrarouge en une paire dont la réponse spectrale est proche des monomères. Les résultats de cette étude pourrait expliquer que dans la phase gaz, les complexes formés avec HI et HBr sont instables du fait de la double attaque du groupement -CN qui donnent lieu à la réaction observée.
6) Analyse des propriétés spectroscopiques des complexes 1-1 entre les hydracides HCl, HBr et les bases diméthyléther ou oxyde d'éthylène. [16,18,20,27]
L'analyse du profil de la bande d'absorption du vibrateur AH impliqué dans une liaison hydrogène a été l'objet de nombreux travaux tant expérimentaux que théoriques en phase gazeuse, liquide ou solide. La technique des matrices qui permet d'isoler parfaitement un complexe 1-1 dans un milieu quasiment inerte est donc susceptible d'apporter une contribution importante à la détermination du mécanisme de relaxation .. Les deux systèmes étudiés ont permis à partir de nos résultats expérimentaux, de développer une nouvelle approche théorique rendant compte des profils observés et de leur évolution en passant du gaz à la matrice.
7)- Mise en évidence du transfert du proton dans les systèmes HI-NH3 et Hl-triméthylamine
La possibilité de transfert de proton dans une paire isolée a donné lieu à de nombreux travaux tant théoriques qu'expérimentaux. En utilisant comme donneur de proton l'iodure d'hydrogène, et une base forte (NH3 ou N(CH3)3), nous avons pu suivre progressivement le transfert du proton en passant des matrices atomiques très inertes (Ar, Ne) à des matrices quadrupolaires (02, N2, C2H4~). La modification de l'environnement de la paire par le biais d'un champ de réaction, traduisant l'effet de polarisation du milieu, donne des résultats spectaculaires, la fréquence du proton passant de 1200 cm-1 environ en matrices de gaz rares (proton partagé) à 2315 cm-1 en matrice d'éthylène. Cette dernière fréquence qui est la même pour les deux bases NH3 et N(CH3)3, apparaît comme la limite atteinte après transfert du proton et formation de la paire d'ion XH'NR3. Nous pensons ainsi avoir observé pour la première fois un transfert de proton dans un milieu relativement inerte mais dont les propriétés électriques jouent un grand rôle sur le processus de transfert, comme l'avaient justifié formellement les théoriciens qui avaient introduit la notion de champ de réaction. Cette étude poursuivie avec les espèces deutérées apporte d'autres informations
intéressantes. Le deutéron apparaît se transférer plus facilement puisqu'en matrice d'azote où le proton n'est pas encore totalement transféré à N(CH3)3, le deutéron l'est totalement, sa fréquence caractéristique étant observée à une fréquence (1700 cm-1 ) supérieure à celle du vibrateur ID libre (1600 cm-1). Par ailleurs, la deutériation de l'ammoniac en matrice d'azote met en évidence la grande mobilité de charge le long de la liaison hydrogène, qui se traduit par une augmentation importante de l'intensité des bandes de combinaison entre un mouvement de déformation de la base complexée et un mode de libration du complexe.
Commentaires